Plus de 70 ans…. Les baux d’immeubles ou de parties d’immeubles affectés à l’exercice d’un commerce de détail ou à l’activité d’un artisan en contact direct avec le public est soumis à la loi sur les baux commerciaux du 30 avril 1951.
Une loi encore en phase avec son temps ?
Revenons sur les principes généraux régissant la loi sur les baux commerciaux.
Pour rappel, la durée du bail ne peut être inférieure à neuf années. Le preneur peut cependant y mettre fin à l’expiration de chaque triennat moyennant un préavis de 6 mois signifié au bailleur par exploit d’huissier ou par lettre recommandée.
De même, le bail peut autoriser le bailleur à résilier le contrat à l’expiration de chaque triennat moyennant un préavis d’un an signifié au locataire par exploit d’huissier ou par lettre recommandée en cas d’exploitation par le bailleur lui-même ou par sa famille.
Les parties peuvent également mettre fin au bail à tout moment, à condition que leur accord soit constaté par acte authentique ou par une déclaration faite devant le juge.
A l’expiration de chaque triennat, les parties ont le droit de demander au juge de paix la révision du loyer, à charge d’établir que, par le fait de circonstances nouvelles, la valeur locative normale de l’immeuble loué est supérieur ou inférieur d’au moins 15 p.c. au loyer stipulé dans le bail ou fixé lors de la dernière révision.
Enfin, pour rappel, le preneur a le droit d’obtenir, par préférence à toute autre personne, le renouvellement de son bail pour la continuation du même commerce, soit à l’expiration de celui-ci, soit à l’expiration du premier ou l’expiration du deuxième renouvellement, pour une durée de neuf années, sauf accord des parties constaté par un acte authentique ou par une déclaration faite devant le juge. Ce droit est limité à trois renouvellements et à des conditions de formes très formelles et avec à la clef des indemnités d’éviction.
Cette loi n’est manifestement plus en adéquation avec son temps. De plus en plus de bailleurs veulent des baux de plus longue durée, quitte à privilégier des baux emphytéotiques. Le champ d’application de la loi ne répond pas à des changements quant au type de commerce, quant à la définition même du contact avec la clientèle ou quant à un formalisme poussé à l’excès quant à la demande de renouvellement.
Comment peut-on croire qu’une loi peut survivre 70 ans sans poser de problèmes d’application et surtout pourquoi le bail commercial est le parent pauvre des réformes en comparaison avec la loi sur les baux de résidence principale.
Par la loi du 6 janvier 2014 quant à la sixième réforme de l’Etat, le législateur a transféré aux régions la compétence de fixer les règles relatives aux baux commerciaux tout en réservant à l’Etat Fédéral la compétence quant au bail de droit commun.
Force est de constater que les législateurs régionaux restent en grande partie muets après près de 10 ans…
En effet, les législateurs régionaux n’ont pas fait usage de cette nouvelle compétence, la loi du 30 avril 1951 restant donc d’application.
Seul exception les baux de courte durée.
Le législateur flamand avait lancé la dynamique en 2016, il fut suivi en 2018 par la Région wallonne et en 2019 par la Région bruxelloise.
Ce nouveau « bail commercial », faisant l’objet d’une réglementation spécifique, répond à une demande du commerçant souhaitant louer une surface commerciale sans pour autant se lier pour 9 ans via un bail commercial classique. De même un bailleur hésitant quant à la destination à donner à son bien pourra s’engager sur une plus courte période.
A noter qu’en ce qui concerne le législateur wallon, ce dernier a profité de cette réglementation pour modifier les articles 13 et 14 de la loi sur les baux commerciaux : la résiliation amiable ne nécessitera plus un acte authentique ou d’une déclaration devant le Juge de Paix.
Un acte écrit soumis à l’enregistrement suffira. Il en est de même quant à la validité de la renonciation du locataire à se prévaloir de son droit au renouvellement.
On le voit. A part une réforme poussée par le boom des « pop-up stores », le législateur régional reste muet depuis près de 10 ans après une léthargie de 60 ans du législateur fédéral.
Un désintérêt des acteurs commerciaux qui pose question tant cette législation n’est plus adéquate.
Le renvoi de la patate chaude aux législateurs régionaux fait craindre également des législations différenciées en fonction des régions. En cas de réforme, il sera donc indispensable pour les commerçants de se tenir à jour afin d’éviter toute mauvaise surprise.